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Blandine Salla, coordinatrice du projet « interprétariat et pair-aidance » pour le CSAPA Danielle Casanova, à Marseille.

Blandine Salla évoque son travail en tant que coordinatrice du projet inter-associatif « interprétariat et pair-aidance » au sein du CSAPA Danielle Casanova à Marseille, spécialisé dans l’accompagnement des personnes en situation d’addiction. Ce projet, né de la collaboration entre 7 structures marseillaises du domaine de l’addictologie, vise à surmonter les barrières linguistiques en favorisant l’interprétariat professionnel pour les usagers allophones, facilitant ainsi l’accès aux soins et aux droits.

Bonjour Blandine, peux-tu nous présenter en quelques mots ton parcours, ta fonction et la structure pour laquelle tu travailles ?

Après des études en économie de la santé, j’ai travaillé 12 ans en Haïti, principalement sur des projets relatifs à l’accès aux soins, avant de revenir en France où j’ai obtenu un Master en anthropologie.
J’ai été recrutée au sein du CSAPA Danielle Casanova par le Groupe SOS en février 2020, où je travaille comme coordinatrice du projet inter-associatif « interprétariat et pair-aidance »

Le CSAPA Danielle Casanova, basé à Marseille, est spécialisé dans le soin, la prévention et l’accompagnement des personnes en situation d’addiction. L’objectif du projet est de favoriser des médiations via l’interprétariat et la pair-aidance au sein des structures addiction de Marseille.

Le projet sur lequel tu travailles, coordonné par le CSAPA Danielle Casanova, a en effet la particularité d’être porté par 7 structures marseillaises travaillant dans le champ de l’addictologie .
Comment est né ce projet inter-associatif ? Comment les associations ont-elles décidé de se regrouper ?

Je n’étais pas là à la naissance du projet, mais je sais qu’en 2019 il y a eu des discussions entre les directions de certaines structures addiction marseillaises qui avaient envie de travailler ensemble. L’idée de porter un projet commun a suscité une grande motivation. Très vite d’autres associations ont rejoint ces concertations et un besoin commun a émergé autour de l’accès à l’interprétariat professionnel pour les usagers.

La population étrangère allophone représente entre 10 et 20% de la file active des différentes structures. La barrière de la langue ne permettait pas à ces personnes de bénéficier, au même titre que ceux parlant le français, de l’accompagnement au soin, de l’accès aux traitements de substitution ainsi qu’à l’accès aux droits et au matériel de réductions des risques.
Les difficultés de communication liées à la barrière de la langue entrainaient parfois des tensions, à l’accueil notamment.

Un autre avantage du projet réside dans le fait qu’il développe les échanges entre les structures partenaires du projet, notamment pour améliorer la coordination des parcours de chaque personne.

L’autre volet du projet, « pair-aidance », vient favoriser la médiation par le biais de travailleurs pairs au sein des structures partenaires.

Vous avez obtenu quel type de financement ?

En janvier 2020, l’ARS nous a accordé un crédit non reconductible sur une durée de trois ans.
Cela nous permet de financer 5h d’interprétariat par mois et par structure.

Comment les interprètes trouvent-ils leur place dans ces équipes pluridisciplinaires ?

Dans certaines structures, les interprètes viennent sur des temps de permanence dédiées d’une demi-journée. Ça marche bien et on constate une vraie intégration de ces interprètes qui sont considérés comme des membres de l’équipe à part entière. Ils participent à l’accueil des personnes non francophones, les accompagnent lorsqu’ils rencontrent un médecin, un travailleur social ou autre, ils participent aussi aux réunions d’équipes, bref ils deviennent au fil des mois des acteurs clés dans les structures.
Dans d’autres structures, les interprètes sont sollicités sur rendez-vous. C’est le cas ici à Casanova où ce service a renforcé les liens entre certains usagers et les professionnels. Leurs problématiques, leurs besoins deviennent accessibles. Des soins qui étaient impossibles avant sont mis en place : les consultations avec les psychologues, l’ajustement des traitements, l’accompagnement social, etc.

Aujourd’hui, un an après le lancement du projet, quelles sont les préoccupations du moment, vos interrogations, vos réussites ?

Une de nos préoccupations du moment est la question de la pérennisation de ce recours à l’interprétariat. Pour les professionnels qui ont pu en bénéficier, et qui constatent tout ce que cela permet en terme qualitatif autour de l’accompagnement des publics allophones, c’est difficile d’imaginer faire sans.

La question que nous nous posons actuellement est de savoir comment valoriser au mieux l’intervention de ces interprètes, sans que ce soit un outil trop lourd de recueil des données.
Au-delà du nombre d’heures utilisées, nous aimerions pouvoir raconter des parcours pour montrer tout l’intérêt de cet interprétariat en présentiel. On constate aussi que certains interprètes qui interviennent depuis un an dans les CSAPA et CAARUD se professionnalisent dans le champ de l’addiction, ce qui donne envie de développer et de valoriser leur expérience.

En fait, travailler l’accès à l’interprétariat a été une réelle opportunité pour les associations de créer une coordination dans leur champ spécifique.
Par exemple, nous sommes en train d’élaborer en ce moment un lexique dans le champ de l’addiction qui doit servir à préparer les interprètes à intervenir dans ces structures. Cela permet aux professionnels d’échanger et de partager sur des notions qui diffèrent parfois en fonction de leur discipline et de leur association de rattachement.

Le but est de créer des réflexions communes, des partages d’idées entre les professionnels qui évoluent dans des structures qui n’ont pas forcément les mêmes missions ni les mêmes méthodes mais qui partagent un lexique commun. L’idée n’est pas d’uniformiser la pensée mais de créer du lien entre les équipes et les associations partenaires.