Jim Harrison, Légendes d’automne, 1981, pp. 228-229.
A Paris, le médecin traitant était un jeune Canadien originaire de Hamilton. On lui avait confié le service de psychiatrie parce que personne n’en voulait. Après des études de médecine complétées à Paris, le jeune médecin s’était vaguement intéressé à cette nouvelle science du comportement humain mais il était mal préparé pour recevoir les pathétiques victimes de la terreur qui lui arrivaient chaque jour. Sa relative inexpérience autant qu’un cynisme très parisien auquel il se forçait, l’amenèrent d’abord à croire que ces hommes n’étaient que des lâches. Il changea bientôt d’avis devant l’étrangeté de leur conduite. Ces soldats n’étaient que des chiots traumatisés qui pleuraient la nuit en appelant leur mère ou se retranchaient dans un silence permanent et total. Le médecin nourrissait si peu d’illusions sur ses capacités à faire revivre ces âmes perdues qu’il finissait par perdre tout intérêt pour ses patients et faisait tout ce qu’il pouvait fin qu’ils soient renvoyés dans leur foyer.